Assurance-vie, primes et réintégration dans l’actif successoral

Dans une affaire, toujours en cours devant le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de PERIGUEUX, la CARSAT a saisi la juridiction aux fins de voir condamner Madame P., cliente de Me Catherine CHEVALLIER, à lui verser 13.110,61 € au titre du remboursement des arrérages de l’allocation supplémentaire versée à son oncle dont elle étaitla seule héritière.

L’article L 132-13 du code des assurances dispose que le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant mais que ces règles ne s’appliquent pas aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés.

Aux termes de l’article D 815-6 du code de la sécurité sociale, le recouvrement s’exerce sur la partie de l’actif net successoral, visé au deuxième alinéa de l’article L. 815-13, défini par les règles du droit commun, qui excède le montant prévu à l’article D. 815-4.

Il ne peut avoir pour conséquence d’abaisser l’actif net de la succession au-dessous du montant visé à l’article D. 815-4.

Toutefois, pour la détermination de l’actif net ouvrant droit au recouvrement, les organismes ou services mentionnés à l’article L. 815-7 ont la faculté de faire réintégrer à l’actif toutes les libéralités consenties par l’allocataire quelle qu’en soit la forme ainsi que les primes versées par celui-ci au titre d’un contrat d’assurance vie dès lors que :

– ces libéralités et ces contrats d’assurance vie respectivement consentis ou conclus postérieurement à la demande d’allocation sont manifestement incompatibles avec les ressources ou biens déclarés par l’allocataire pour obtenir ou continuer à percevoir l’allocation de solidarité ;

– et que ces libéralités et ces primes, en minorant l’actif net successoral, ont eu pour effet de faire obstacle en tout ou partie à l’exercice par les organismes et services précités de leur action en recouvrement sur succession de l’allocation de solidarité. Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que pour réintégrer les primes d’assurance vie à l’actif successoral, la caisse doit établir que le montant des primes était manifestement exagéré et incompatible avec les ressources du bénéficiaire et que ce dernier a délibérément entendu faire obstacle à l’action en recouvrement de la caisse

Par ailleurs, les dispositions de l’article L 132-13 du code des assurances selon lesquelles les primes versées par le souscripteur d’un contrat d’assurance vie sont rapportables à la succession si elles présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés du souscripteur constituent une dérogation aux dispositions de l’article L 132-12 du code des assurances qui excluent de la succession de l’assuré le capital ou la rente stipulé payables lors du décès de l’assuré : elles sont donc d’interprétation stricte.

Le caractère exagéré des primes versées s’évince d’une part de l’âge, de situation patrimoniale et familiale du souscripteur et d’autre part de l’utilité de la souscription, ces deux critères devant être réunis et appréciés au moment du versement des primes.

La question qui devra être tranchée par le juge sera donc de déterminer l’actif successoral eu égard à ces règles. Cette affaire se plaide le 3 décembre prochain.

Les indemnités de la sécurité sociale

Lors de la liquidation du préjudice d’une victime, la Sécurité Sociale (comme la CPAM, la MSA…) demande à être remboursée de ses débours.

Cela signifie qu’elle sollicite le paiement par l’auteur ou son assurance des indemnités versées à la victime, causées directement par la commission de l’infraction, de la faute médicale, de l’accident, etc.

Ce sont principalement les indemnités journalières. Mais ce peut être également les frais de transport, les frais de médecin ou spécialiste ou de kiné (déduction faite de la franchise), etc.

Les régimes de Sécurité Sociale sont des tiers payeurs, dont le droit à recours est réglementé.

Il doit en être tenu compte dans la détermination de l’indemnisation de la victime.

Certaines prestations (comme la pension d’invalidité) viennent en déduction de la propre indemnisation de la victime. Concrètement, cela signifie que, lorsque la Sécurité Sociale fait valoir un capital au titre de la pension d’invalidité par exemple, ce capital est déduit des postes de Perte de Revenus futurs, d’incidence professionnelle et du Déficit Fonctionnel Permanent.

La victime ne perçoit que le reliquat éventuel, ou rien, sur ces postes de préjudices.

Il faut être prudent, tout vérifier et s’assurer que la créance de la Sécurité Sociale ne couvre que les préjudices fixés par expertise.

Acte médical non fautif

Si l’article L. 1142-1, II, du Code de la santé publique soumet l’indemnisation d’un accident médical non fautif au titre de la solidarité nationale à plusieurs conditions, dont celle qu’il soit directement imputable à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins, il n’exclut pas que la preuve d’une telle imputabilité puisse être rapportée par tout moyen et notamment par des présomptions, pourvu qu’elles soient précises, graves et concordantes.

Accident du travail et obligations de l’employeur

Dans son jugement du 17 septembre 2020, le Pôle Social du Tribunal Judiciaire (ancien TASS – Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale) de PERIGUEUX a fait droit à la demande de Me Catherine CHEVALLIER de voir reconnaître la faute inexcusable de l’employeur dans la survenance de l’accident du travail de son client, le 16 mai 2014.

Les juges ont suivi son argumentation visant à démontrer que, même si Mr L. connaissait la machine sur laquelle il travaillait et la nécessité de régler le protecteur, il appartenait à l’employeur de tenir compte, dans son rôle de prévention des comportements humains prévisibles des salariés habitués à l’utilisation de la machine, de les alerter de manière insistante sur les risques importants résultant de la routine et de la facilité.

La faute inexcusable de l’employeur et sa condamnation pénale

La condamnation pénale pour blessures involontaires dans le cadre du travail établit la conscience du danger et constitue un élément déterminant permettant de caractériser la faute inexcusable devant le pôle social du tribunal de grande instance – aujourd’hui Tribunal Judiciaire.

Si l’employeur peut soutenir, en défense à l’action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l’accident, la maladie ou la rechute n’a pas d’origine professionnelle, il n’est pas recevable à contester la décision de prise en charge de l’accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation sur les risques professionnels 

Cass. 2e civ., 11 oct. 2018, n° 17-18.712 

Mais attendu que, la chose définitivement jugée au pénal s’imposant au juge civil, l’employeur définitivement condamné pour un homicide involontaire commis, dans le cadre du travail, sur la personne de son salarié et dont la faute inexcusable est recherchée, doit être considéré comme ayant eu conscience du danger auquel celui-ci était exposé et n’avoir pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ;

Et attendu que l’arrêt constate que, par jugement définitif du 1 juillet 2005, le tribunal correctionnel de Strasbourg a déclaré l’employeur coupable d’un homicide involontaire commis, dans le cadre du travail, sur la personne de Mouldi B. ;

Que par ce motif de pur droit, suggéré par la défense et substitué à celui critiqué par le moyen, la décision se trouve légalement justifiée

Par conséquent, de la condamnation pénale, il découle nécessairement que les critères de la faute inexcusable sont réunis.



[i] Cass. 2e civ., 15 juin 2004

[ii] Cass. 2e civ., 11 oct. 2018, n° 17-18.712   

L’aide humaine

Il est rappelé que la jurisprudence énonce clairement que l’assistance d’une tierce personne ne peut être supprimée ou réduite en cas d’assistance conjugale ou familiale (ex : Civ2 14/11/02 JD n°2002-016308) et que le montant de l’indemnité allouée à ce titre ne saurait non plus être réduite dans ce cas ni subordonnée à la production de justificatifs de dépenses effectives (Civ2 14/11/02 JD n° 2002-016477).

C’est le besoin et non la réalité de la dépense qui fonde l’indemnisation sur la base horaire forfaitaire comprenant les charges patronales, selon une jurisprudence bien établie depuis longtemps : c’est le principe jurisprudentiel bien acquis de la non affectation du dommage (Civ² 20.06.2013).

Ce poste vise à indemniser le coût pour la victime de la présence nécessaire d’une aide à ses côtés pour l’assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d’autonomie.


Les préjudices de la société

Le juge de BERGERAC a fixé, le 7 août 2020 à la somme de 47 076 euros la liquidation du préjudice de la société (une SAS) dont la gérante, cliente de Me Catherine CHEVALLIER, avait été victime d’un accident de la route.

Il tient compte de la perte d’exploitation et des frais bancaires engendrés par la baisse du chiffre d’affaire et l’embauche de salariés durant l’absence de la gérante.

Cela avait été chiffré par le comptable de la société.

Expertise et procédure

Dans son jugement du 8 septembre 2020, le Tribunal Judiciaire de PERIGUEUX rappelle que, même si l’assureur du responsable d’un accident n’était pas représenté dans le cadre d’une expertise amiable mise en place par l’assureur de la victime, l’expertise amiable, comme l’expertise judiciaire, constitue un élément de preuve qui, dès lors que ladite expertise a pu être discuté par les parties dans le cadre du débat contradictoire, peut être invoquée par elles au soutien de leurs prétentions, le tribunal usant de son pouvoir souverain d’appréciation des éléments qui lui sont soumis pour prendre sa décision.

Les frais divers

Dans le cadre de la nomenclature DINTHILLAC reprise par les tribunaux, les frais divers exposés par la victime d’un accident doivent être remboursés par le responsable ou son assurance.

Le Tribunal de PERIGUEUX rappelle que ce poste de préjudice comprend:

  • les frais liés à l’hospitalisation : location de TV et chambre individuelle notamment ; « il convient d’accorder à la victime le confort dont elle aurait bénéficié si l’accident ne s’était pas produit »
  • les dépenses liées à la réduction d’autonomie, qui peuvent être temporaires entre le dommage et la consolidation ; « l’évaluation doit se faire au regard de l’expertise médicale et de la justification des besoins et non au regard de la justification de la dépense, afin d’indemniser la solidarité familiale »
  • les frais de déplacement pour consultations et soins, les frais de garde d’enfants ou d’aide ménagère, notamment
  • les frais de transport et d’hébergement des proches pour visiter la victime, la rémunération d’un médecin conseil pour les opérations d’expertise ou autre frais divers.

Il rappelle aussi que « la seule date de consolidation de l’état de la victime d’un accident de la circulation n’est pas de nature à exclure du droit à indemnisation les frais engagés postérieurement dès lors qu’ils sont en relation directe avec l’accident. »

La formation obligatoire des avocats

Comme ses confrères, Maître Catherine CHEVALLIER doit assister à 20 heures de formation par an, dont 10 heures par an dans sa spécialité (Droit du dommage corporel).

Ainsi, quatre formations sont au programme pour cette fin d’année 2020 :

  • l’indemnisation dans les cas d’accidents médicaux non fautifs, le 10 septembre de 14h à 17h
  • le recours des tiers payeurs, le 16 septembre de 9h30 à 17h
  • le chiffrage des dommages intérêts, le 30 septembre de 9h30 à 17h
  • la pratique de la CIVI (Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions), le 24 novembre de 9h30 à 17h