La résidence alternée

Devant le Juge aux Affaires Familiales de PERIGUEUX, Maître CHEVALLIER a défendu les intérêts d’un père demandant la garde alternée de son enfant de 10 ans.

Malgré l’opposition de la mère, dans sa décision du 13 mai 2019, le juge a fait droit à la demande du père compte tenu des critères suivants « objectivement réunis » :

  • les deux parents sont en capacité de lui fournir le cadre affectif et éducatif nécessaire à son bon développement
  • ils résident à une distance suffisante de son lieu de scolarisation
  • le père s’est toujours beaucoup investi auprès de l’enfant
  • le père peut s’organiser au plan professionnel pour assurer la prise en charge optimale de l’enfant une semaine sur deux et notamment l’amener sur son lieu de scolarisation en temps et heure et de venir l’y reprendre à une heure raisonnable.

Bien entendu, ces critères ne sont pas les seuls qui peuvent être évoqués au soutien d’une demande d’un père d’une résidence alternée.

Compte tenu d’une résidence alternée sur un rythme égalitaire, il n’y a pas lieu  de prévoir de pension alimentaire.

Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge déclarés conformes à la Constitution

La Décision n°2018-768 QPC du 21 mars 2019, M. Adama S. [Examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge] était particulièrement attendue, tant par les associations de protection de l’enfance, que les structures d’accueil des mineurs étrangers isolés et, bien entendu, les avocats pratiquant le droit des étrangers.
Elle laisse donc à tous un goût amer…
Pour rappel, le Conseil Constitutionnel avait été saisi le 21 décembre 2018 d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC*) après qu’un jeune guinéen, arrivé en France en 2016 et affirmant alors être âgé de 15 ans, ait été considéré comme majeur par le juge des enfants en raison de son refus de se soumettre aux tests osseux prévus par l’article 388 du Code civil.
Le jeune homme avait fait appel de cette décision et consenti à un tel examen afin de prouver sa bonne foi. Malheureusement, les tests osseux lui avaient attribué un âge compris entre 20 et 30 ans. Devant la Cour de cassation, il dénonçait le manque de fiabilité de ces tests réalisés à partir d’une radiographie (généralement du poignet) pour pouvoir y fonder une décision de justice.
Saisi par la Haute Juridiction, le Conseil Constitutionnel devait donc se prononcer sur la question de la conformité de l’article 388 du Code civil aux droits et libertés que la Constitution garantit.
Plusieurs moyens d’inconstitutionnalités étaient soulevés par le requérant, soutenu par de nombreuses associations:
  • Il invoquait d’abord la méconnaissance, par les dispositions précitées, de l’exigence de protection de l’intérêt de l’enfant fondée sur le dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, dès lors que le manque de fiabilité des examens radiologiques osseux conduirait à juger comme majeurs des mineurs étrangers isolés et à les exclure en conséquence du bénéfice des dispositions législatives destinées à les protéger;
  • Il était également soutenu que le droit à la protection de la santé serait méconnu par les dispositions contestées, en ce qu’elles autoriseraient le recours à un examen radiologique comportant des risques pour la santé, sans finalité médicale et sans le consentement réel de l’intéressé.
  • Pour les mêmes motifs, ces dispositions contreviendraient au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.
  • Elles seraient également contraires au droit au respect de la vie privée dans la mesure où elles aboutiraient à la divulgation de données médicales concernant les mineurs isolés, sans que ceux-ci y aient consenti.
  • Enfin, les dispositions contestées seraient entachées d’incompétence négative dans des conditions portant atteinte au principe d’égalité devant la loi en tant qu’elles permettent le recours à des examens osseux en l’absence de “documents d’identité valables” sans préciser cette notion ni renvoyer à d’autres dispositions législatives qui le feraient.
D’un simple revers de main, le Conseil Constitutionnel a balayé cet argumentaire en considérant notamment, sur le grief tiré de la méconnaissance de l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant :
  • que seule l’autorité judiciaire peut décider de recourir à un tel examen;
  • cet cet examen ne peut être ordonné que si la personne en cause n’a pas de documents d’identité valables et si l’âge qu’elle allègue n’est pas vraisemblable.
  • cet examen ne peut intervenir qu’après que le consentement éclairé de l’intéressé a été recueilli, dans une langue qu’il comprend. À cet égard, la majorité d’une personne ne saurait être déduite de son seul refus de se soumettre à un examen osseux.
  • le législateur a pris en compte, dans les garanties qu’il a établies, l’existence de la marge d’erreur entourant les conclusions des examens radiologiques: d’une part, il a imposé la mention de cette marge dans les résultats de ces examens; d’autre part, il a exclu que ces conclusions puissent constituer l’unique fondement dans la détermination de l’âge de la personne.
Pour le Conseil Constitutionnel, il appartient à l’autorité judiciaire d’apprécier la minorité ou la majorité de la personne en prenant en compte les autres éléments ayant pu être recueillis, tels que l’évaluation sociale ou les entretiens réalisés par les services de la protection de l’enfance. Si les conclusions des examens radiologiques sont en contradiction avec les autres éléments d’appréciation susvisés et que le doute persiste au vu de l’ensemble des éléments recueillis, ce doute doit profiter à la qualité de mineur de l’intéressé.
Le Conseil Constitutionnel en conclut donc que, “compte tenu des garanties entourant le recours aux examens radiologiques osseux à des fins de détermination de l’âge, le législateur n’a pas méconnu l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant découlant des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946. Le grief tiré de la méconnaissance de cette exigence doit donc être écarté.
Les griefs tirés de la méconnaissance du droit à la protection de la santé ou encore du principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et de l’inviolabilité du corps humain ont pareillement été écartés.
En conséquence, dans sa décision n°2018-768 QPC du 21 mars 2019, le Conseil Constitutionnel a considéré que les deuxième et troisième alinéas de l’article 388 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant, sont conformes à la Constitution.
 
Par cette décision, le Conseil Constitutionnel a certes tenu à mettre en garde les magistrats contre les risques d’un recours abusif et une confiance excessive en ces tests osseux mais ceux-ci pourront continuer à être pratiqués avec les conséquences que l’on connaît…
Nous entendons aussi les inquiétudes – légitimes – des services de l’Aide Sociale à l’Enfance qui ne peuvent prendre le risque de laisser des majeurs qui se prétendraient mineurs côtoyer de “vrais” mineurs vulnérables du fait de leur âge mais aussi et surtout en raison d’une histoire familiale et personnelle particulièrement douloureuse.
De notre côté, nous sommes néanmoins inquiets pour ces jeunes dont les conditions de prise en charge sont incertaines.
Si les juges du fond concluent à leur majorité et par conséquence, à leur exclusion des dispositifs d’accueil des mineurs, ils n’en déterminent pour autant pas l’âge exact. Dès lors, ces jeunes ne peuvent pas non plus intégrer les Foyers jeunes travailleurs ou conclure des contrats jeunes majeurs…
Quelle solution leur reste-t-il?
L’avenir le dira au gré des évolutions législatives et scientifiques.
En attendant, le parcours du combattant continue et j’ai aujourd’hui une pensée toute particulière pour les jeunes clients dont l’affaire est en cours, devant le Juge des Enfants ou la Chambre des mineurs de la Cour d’Appel et qui attendaient beaucoup de la décision du Conseil Constitutionnel…
 
*QPC: Introduite en droit français par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, la QPC, prévue par l’article 61-1 de la Constitution, est une procédure de contrôle de constitutionnalité des lois déjà promulguées (contrôle a posteriori) qui permet, sous certaines conditions, au Conseil d’Etat ou à la Cour de Cassation de demander au Conseil Constitutionnel de vérifier si une disposition législative ne serait pas inconstitutionnelle en ce qu’elle “porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution”.

La certification « AB » ne peut être délivrée à des produits issus d’animaux abattus sans étourdissement préalable

Tel est le sens de l’arrêt – très attendu – rendu le 26 février dernier par la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE).
Explications:
En 2012, l’association française Oeuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoirs (OABA), avait soumis au Ministre de l’Agriculture de l’époque une demande visant à faire interdire la mention « agriculture biologique » (AB) sur des publicités et emballages de steaks hachés de bœuf certifiés « halal » issus d’animaux abattus sans étourdissement préalable.
Après quelques péripéties en première instance et face à cette question de droit inédite, la Cour Administrative d’Appel de VERSAILLES avait saisi la CJUE lui demandant si les règles applicables du droit de l’Union devaient être interprétées comme autorisant ou interdisant la délivrance du label européen « AB » à des produits issus d’animaux ayant fait l’objet d’un abattage rituel sans étourdissement.
La question se posait en effet dans la mesure où, s’il est bien entendu indispensable de protéger la liberté de culte, le Règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques prévoit, parmi les objectifs de la production biologique, d’une part des “normes élevées en matière de bien-être animal” et d’autre part, une “souffrance réduite au minimum pendant toute la durée de vie de l’animal, y compris lors de l’abattage”.
Lors de l’audience le 19 juin 2018, la Grèce et la Norvège notamment avaient apporté leur soutien à l’OABA.
Pourtant, dans ses conclusions en date du 20 septembre 2018, Monsieur l’Avocat Général Nils WAHL avait indiqué que le Règlement relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et son règlement d’application, bien que silencieux sur la question du recours aux abattages sans étourdissement, ne posaient aucune condition en matière d’étourdissement préalablement à la mise à mort pour bénéficier de la mention “AB”.
Selon lui, le silence des textes sur ce point ne pouvait être considéré comme fortuit en raison du fait, notamment, que cette question est connue depuis longtemps dans les textes régissant l’abattage des animaux.
Poursuivant son raisonnement, il indiquait qu’une incompatibilité entre l’abattage rituel (halal ou casher) et le label “AB” ajouterait une condition que les règles actuelles ne prévoient pas et bloquerait l’accès des consommateurs de produits casher ou halal aux garanties offertes en termes de qualité et de sécurité alimentaires par le label “AB”.
En définitive, Monsieur l’Avocat Général proposait à la Cour de juger que le Règlement relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et le Règlement sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort n’interdisent pas la délivrance du label européen “AB” à des produits issus d’animaux ayant fait l’objet d’un abattage rituel sans étourdissement préalable.
Faisant fi de ces conclusions, par un arrêt en date du 26 février 2019, la CJUE a fait sienne la position de l’OABA, soutenue par nombre de pays européens, jugeant qu’”en exigeant d’une part, des “normes élevées en matière de bien-être animal” comme l’un des objectifs de la production biologique et d’autre part, une “souffrance réduite au minimum pendant toute la durée de vie de l’animal, y compris lors de l’abattage”, le règlement n° 834/2007 CE n’entend pas autoriser l’abattage d’animaux sans insensibilisation.”
Une décision saluée par l’OABA bien évidemment, mais aussi par la Fédération Nationale de l’Agriculture biologique qui se réjouit “d’une décision cohérente avec le cahier des charges et l’éthique de la production biologique qui guident les pratiques des éleveurs et éleveuses bio” et, à son niveau, par Virginie ESTAGER, qui fait de la cause animale son combat quotidien.

42.717€ alloués à la cliente au titre de l’enrichissement injustifié dont son ex-concubin avait bénéficié

L’article 1303 du Code Civil dispose que: “En dehors des cas de gestion d’affaires et de paiement de l’indu, celui qui bénéficie d’un enrichissement injustifié au détriment d’autrui doit, à celui qui s’en trouve appauvri, une indemnité égale à la moindre des deux valeurs de l’enrichissement et de l’appauvrissement.
Dans les rapports entre ex-concubins toutefois, l’enrichissement sans cause, désormais appelé enrichissement injustifié, est rarement admis, chacun devant contribuer aux dépenses de la vie commune.
C’est bien là que se trouve toute le subtilité!
En effet, la jurisprudence a pu relever le caractère inhabituel des dépenses engagées par le concubin ayant assumé des dépenses obligatoires afférentes à des immeubles personnels de la concubine et excédant largement la contribution aux dépenses de la vie commune (voir en ce sens CA Paris, 14 janvier 1987 ; CA Paris 2 avril 1999).
Dans l’affaire soumise à Maître ESTAGER justement, en plus de sa contribution aux dépenses de la vie courante, sa cliente avait financé d’importants travaux sur le bien de son ex-concubin. Durant plusieurs années, elle avait en outre assumé seule le remboursement du crédit souscrit en vue de l’amélioration du bien propre à Monsieur.
Les fonds injectés par l’ex-concubine avaient naturellement eu pour conséquence une augmentation significative du patrimoine de l’ex-concubin.
L’enrichissement de ce dernier était ainsi caractérisé par la plus-value acquise par son immeuble (Ccass., Civ. 1ère, 15 mars 1960), ou encore par le fait qu’il est aujourd’hui seul propriétaire d’une maison améliorée grâce à son ex-concubine (Ccass. Civ. 1ère, 4 juillet 1995, n°93-19.205).
Cet enrichissement de l’un s’était accompagné de l’appauvrissement corrélatif de l’autre, condition sine qua non de l’enrichissement injustifié.
En effet, une simple lecture des relevés du compte personnel de l’ex-concubine sur plusieurs années permettait de constater l’ampleur des fonds injectés pour l’amélioration du bien de l’ex-concubin.
Cette somme aurait pu être utilisée par Madame pour ses propres besoins: elle aurait notamment pu s’acheter une maison ou encore souscrire une assurance vie par exemple.
Il n’en était rien!
Ces fonds n’avaient servi qu’à augmenter le patrimoine de Monsieur !
Or, dans une affaire similaire, après avoir constaté que les dépenses engagées et les travaux effectués dans l’immeuble appartenant à l’ex-concubin excédaient par leur ampleur la participation normale aux dépenses de la vie commune et ne pouvaient être considérés comme une contrepartie des avantages dont il avait profité pendant la période du concubinage, la Cour de cassation avait approuvé la Cour d’appel d’en avoir déduit l’absence d’intention libérale de l’appauvri et donc, l’absence de cause (Ccass. Civ. 1ère, 24 septembre 2008, n°06-11.294).
Dans l’affaire qui nous intéresse justement, la cliente n’avait aucune intention libérale de procurer un tel enrichissement à son ancien compagnon.
Cet enrichissement ne procédait pas non plus de l’accomplissement d’une obligation par Madame. En effet, cette dernière n’était ni propriétaire du bien ni seul bénéficiaire du prêt consenti par la banque. Si Madame avait assumé seule ces dépenses excédant sa participation normale aux dépenses de la vie commune, c’était donc uniquement pour pallier la carence de Monsieur.
Enfin, la partie adverse ne pouvait soutenir que Madame avait financé les travaux avec l’intention de s’installer dans la maison, celle-ci vivant sur la période considérée à des centaines de kilomètres de là.
En conséquence, l’enrichissement de Monsieur était nécessairement injustifié au sens de l’article 1303-1 du Code Civil.
Il devait donc donner lieu à indemnisation.
C’est fort heureusement ce qu’a retenu le Tribunal de Grande Instance de BRIVE LA GAILLARDE dans un Jugement en date du 7 décembre 2018, aujourd’hui définitif.
La cliente s’est ainsi vu allouer, au principal, la somme de 42.717,48€ outre 1.954,35€ au titre de la capitalisation des intérêts et 1.200€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Avec cette décision, satisfaisante mais juste, la cliente pourra tourner une page.
Merci, Madame, pour votre confiance.
Très bonne continuation.
Virginie ESTAGER

Belle victoire dans l’affaire des « Gilets Jaunes du dépôt Péribus »

5 mois d’emprisonnement entièrement assortis de sursis avec mise à l’épreuve (SME) au lieu des 8 mois d’emprisonnement fermes requis plus tôt dans la journée par Monsieur le Procureur de la République (le client n’était plus éligible au sursis simple).

Une belle victoire de Maître Virginie ESTAGER dans ce dossier qui avait suscité une vive émotion à Périgueux au mois de décembre 2018!

Les intérêts au double du taux légal

En application de la loi BADINTER, Maître Catherine CHEVALLIER a demandé la condamnation d’un assureur à payer, en plus de l’indemnisation des préjudices de son client, une somme de 913,22 € correspondant aux intérêts doublés.

Le rapport médical définitif avait été envoyé le 20 janvier 2016.

L’offre aurait dû être faite au plus tard le 20 juin 2016 (expiration du délai de 5 mois après l’envoi du rapport).

L’offre a été présentée le 21 décembre 2016.

Maître CHEVALLIER a obtenu que la sanction s’applique sur les montants offerts par l’assurance (créance de la sécurité sociale incluse) et à compter du 20.06.2016 jusqu’au 21.12.2016 :

Années Taux normal Jours Jours/année Capital Intérêts
20 830,12
Taux doublé
2015 8,12 0 365 0,00
2015 8,58 0 365 0,00
2016 9,08 10 366 51,68
2016 8,7 174 366 861,55
2017 8,32 0 366 0,00
2017 7,88 0 366 0,00
TOTAL 913,22

Son client a obtenu 913,22 € simplement grâce au temps qui passe… et au non respect des délais par l’assurance !

Les délais de la Loi BADINTER

La Loi BADINTER impose des délais stricts aux assurances pour présenter des offres d’indemnisation, provisionnelle ou définitive.

Elle est reprise par le Code des Assurances.

Notamment, les articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des Assurances, reprenant la Loi BADINTER, imposent à l’assureur de l’auteur d’un accident de la circulation impliquant son véhicule terrestre à moteur de présenter une offre d’indemnisation définitive conforme aux dispositions de l’article R. 211-40 du même code, à la victime dans les cinq mois à compter de la date à laquelle il a eu connaissance de la consolidation de son état.

A défaut de ce faire, il est condamné au paiement d’intérêts au double du taux légal à compter de la date à laquelle il aurait dû faire l’offre et celle à laquelle il l’a réellement faite.

De jurisprudence constante, ce doublement s’applique à la totalité de l’indemnité allouée à la victime à titre de dommages-intérêts et non pas au solde restant dû après déduction des provisions déjà versées  ou après imputation de la créance des tiers payeurs : la sanction prévue par l’article L. 311-13 du code des assurances a pour assiette la totalité de la somme indemnisant le préjudice de la victime.

Pour faire simple : l’assurance d’un véhicule terrestre à moteur doit adresser, directement à la victime, par recommandé avec accusé de réception, son offre définitive dans les 5 mois à compter de la date de réception du rapport médical définitif.

Sinon, l’indemnisation doit être majorée des intérêts au taux légal doublé.

L’intérêt de l’avocat et d’une procédure en matière d’indemnisation

Monsieur L. a été victime d’un accident de la route en octobre 2014 : roulant à motocyclette, il a été percuté par une voiture qui lui a coupé la route.

Il a été consolidé par le médecin expert en janvier 2016.

Très en retard par rapport aux délais imposés par la Loi BADINTER du 5 Juillet 1985, l’assurance lui a présenté une offre de 8 291 euros en décembre 2016.

La refusant, Maître Catherine CHEVALLIER a présenté immédiatement une demande à hauteur de 32 300 euros.

L’assurance a alors offert… 9 700 euros.

Sur les conseils de son avocate, Monsieur L. a saisi le Tribunal de Grande Instance de PERIGUEUX qui, dans un jugement en date du 18 Décembre 2018, lui alloue une indemnisation totale de 27 965 €.

Le sexe sans consentement

Le 23 novembre, le Docteur Paul BENSUSSAN, psychiatre-Expert agréé par la Cour de Cassation et par la Cour Pénale Internationale nous a fait l’honneur d’animer une Conférence à PERIGUEUX sur le thème du sexe sans consentement.

Dans le procès pénal en effet (mais aussi éventuellement devant le Juge aux Affaires Familiales), il n’est pas toujours facile de bien cerner les contours des notions de désirs, besoins et consentement, spécialement dans le cadre des relations entre époux.

Or cela pose bien entendu des difficultés lorsque l’épouse – ou l’époux – fait état de relations non consenties qu’elle ou il aurait subies.

Ainsi, jusqu’à une période récente, le mariage et, plus largement, le PACS et le concubinage, faisaient présumer l’existence d’un consentement aux relations sexuelles.

Les actions des associations de défense des victimes, les travaux d’experts psychologues et experts psychiatres et les évolutions jurisprudentielles ont – fort heureusement – permis de revenir sur cet acquis.

Quelques dates qui témoignent de cette prise de conscience:

Loi du 23 décembre 1980 relative à la répression du viol et de certains attentats aux moeurs: définit le viol comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ».

Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 juillet 1984 (n°84-91.288): Pour la première fois, la Cour de cassation admet le viol entre époux en instance de divorce.

Cour de cassation, Chambre criminelle, 5 septembre 1990: Six ans plus tard, la Cour de cassation reconnaît le crime de viol entre époux durant le mariage.

Cour d’appel d’Amiens, 3ème chambre civile, 28 février 1996: Paradoxalement, dans cet arrêt, les conseillers de la Cour d’appel ont jugé que le refus prolongé par une épouse de la sexualité constituait une “violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage, rendant intolérable le maintien de la vie commune”, ce qui avait abouti au prononcé du divorce aux torts exclusifs de l’épouse.

A contrario, les juges condamnent aussi celui qui ne peut assurer à son épouse la sexualité à laquelle elle prétend: pour une illustration, cf Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 3 mai 2011: 10.000€ de dommages et intérêts octroyés à l’épouse d’un mari défaillant. Les juges du fond estimaient que : “Les rapports sexuels entre époux sont l’expression de l’affection qu’ils se portent mutuellement, tandis qu’ils s’inscrivent dans la continuité des devoirs découlant du mariage”.

Loi du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs: Le législateur introduit dans le Code pénal la notion de présomption de consentement à l’acte sexuel pour les personnes mariées jusqu’à preuve contraire. Reste maintenant à prouver la contrainte, le comportement amoureux étant parfois doté d’une certaine forme d’ambiguïté, a fortiori aux prémices d’une relation. S’il existe bien entendu le “oui qui veut dire oui” et le “non qui veut dire non”, il existe aussi “le non qui veut dire oui”, un “non érotique”, voire érogène : “Non, non, pas ça… pas ici… pas maintenant…” que tout amant, même attentionné, a pu outrepasser.

Pour reprendre les termes du Docteur BENSUSSAN, “L’amant digne de ce nom doit donc faire preuve de tact dans l’interprétation de ces signaux, surtout avec une nouvelle partenaire, dont il ignore tout du passé ou des blessures anciennes. […] Difficile dès lors de concilier les subtilités et paradoxes du jeu amoureux avec les exigences d’objectivité des critères légaux. Afin qu’il soit vérifiable ou réfutable, le consentement amoureux devrait-il être contractuel, à la façon du « consentement éclairé » donné au chirurgien ?”

La question se pose…

En 2006, le législateur affirme également que le mariage – ou l’existence d’un PACS ou d’une relation de concubinage entre les parties – est une circonstance aggravante de la peine encourue par l’auteur de l’infraction (20 ans de réclusion criminelle au lieu de 15 pour un viol commis sur une personne non liée à l’auteur par les liens du mariage, un PACS ou une relation de concubinage).

Loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants: Supprime la présomption du consentement des époux à l’acte sexuel.

Loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes: Parmi ses nombreuses dispositions, cette loi prévoit notamment un allongement de la durée de prescription de l’action publique, désormais portée à 30 ans, pour les infractions de nature sexuelle, commises sur des mineurs. Ce texte, qui prend en compte les mécanismes de la mémoire traumatique mis en exergue dans les différentes études réalisées sur les victimes d’infractions sexuelles, laquelle peut aboutir pendant un certain temps à une amnésie et à une dénégation du traumatisme sexuel subi, permettra donc dorénavant aux victimes mineures au moment des faits de porter plainte jusqu’à l’âge de 48 ans, soit trente ans après leur majorité.

Autre mesure phare, cette loi modifie l’article 222-23 du Code pénal en prévoyant que le viol n’est plus seulement, “Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise” mais Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise.

Avec cette nouvelle définition, l’élément intentionnel du viol reste inchangé : il suppose toujours la conscience d’imposer à autrui une pénétration sexuelle non consentie. L’élément matériel en revanche est élargi, ce qui permettra désormais de réprimer le fait, par exemple, pour l’auteur d’imposer à la victime de lui faire une fellation. Avant cette loi, conformément au principe d’interprétation stricte de la loi pénale, ces faits ne pouvaient pas être qualifiés de viol et leur auteur n’était donc pas passible de la cour d’assise dans la mesure où concrètement, l’auteur n’avait pas pénétré la victime.

Si cette liste n’est pas exhaustive, elle permet tout de même de prendre la mesure de la prise conscience qui s’est opérée ces dernières années s’agissant de la lutte contre les infractions de nature sexuelle.

À l’heure où, dans le prolongement de l’affaire Weinstein, les femmes n’hésitent plus à se mobiliser contre les violences sexistes et sexuelles, d’abord sur les réseaux sociaux (#MeToo ; #Balancetonporc) puis dans la rue (pas plus tard que ce week-end, le 24 novembre, 12.000 personnes étaient rassemblées à Paris suite à l’appel du Collectif #NousToutes), d’autres évolutions législatives sont à prévoir: en dépit de l’allongement cet été de la durée de prescription pour les infractions de nature sexuelle, certains continuent par exemple de réclamer leur imprescriptibilité.

Quoiqu’il en soit, pour reprendre les termes du Docteur BENSUSSAN, “Distinguer le vrai du faux est le moins que l’on puisse attendre de la justice. Il est pourtant impératif que les avocats, juges et experts se gardent de confondre absence de désir et absence de consentement. À l’échelle d’une vie conjugale, la joliesse n’est pas toujours au rendez-vous et le nombre de relations subies sans désir ni plaisir, pour réguler les tensions ou éviter les reproches, obligerait à n’en pas douter à recruter des juges. Et à construire des prisons.

Quelques principes en matière du dommage corporel

Maître Catherine CHEVALLIER, avocat de victimes (accident de la route, accident médical, aléa thérapeutique, responsabilité médicale, accident du travail), rappelait lors de sa plaidoirie du 3 septembre 2018 les quelques principes suivants :

  • la victime n’est pas tenue de limiter son préjudice dans l’intérêt du responsable
  • c’est le besoin et non la dépense qui fonde l’indemnisation
  • l’indemnisation n’implique aucun contrôle de l’utilisation des fonds

Il s’agissait de demandes d’indemnisation des préjudices d’une victime âgée de 84 ans, atteinte de la maladie d’Alzheimer. L’assurance appuyait sur ces deux points pour réduire drastiquement l’indemnité due à la cliente de Maître Catherine CHEVALLIER.

L’assurance n’a pas été suivie par le juge, qui alloue une indemnisation à hauteur de 43 655 euros à la victime, en ce inclue la majoration de l’aide humaine ou encore les frais de portage de repas ou de télésurveillance.